Aller au contenu principal Activer le contraste adaptéDésactiver le contraste adapté
Fermer

Sur les terres brûlées de Gironde, les premiers signes du retour de la nature
information fournie par AFP 23/06/2025 à 23:36

François Léger, naturaliste de l'association Cistude Nature, tient une tortue cistude, tortue d'eau douce européenne en voie de disparition, alors qu'il effectue un recensement de population dans un étang de la réserve biologique d'Hostens, le 18 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

François Léger, naturaliste de l'association Cistude Nature, tient une tortue cistude, tortue d'eau douce européenne en voie de disparition, alors qu'il effectue un recensement de population dans un étang de la réserve biologique d'Hostens, le 18 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

Entre mottes et roseaux d'une lagune de la réserve d'Hostens, en Gironde, un naturaliste récupère une tortue d'eau douce: sa présence symbolise la résilience d'une partie de la biodiversité ravagée par les gigantesques incendies de 2022.

Dans une cabane d'observation de la zone humide, cette cistude d'Europe, au corps sombre tacheté de jaune, est ensuite examinée, pesée et mesurée.

Et comme elle n'est pas répertoriée, les bords de sa carapace sont délicatement limés, afin de pouvoir l'identifier.

Une tortue cistude, tortue d'eau douce européenne en voie de disparition, récupérée dans un étang de la réserve biologique d'Hostens, le 18 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

Une tortue cistude, tortue d'eau douce européenne en voie de disparition, récupérée dans un étang de la réserve biologique d'Hostens, le 18 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

Désignée comme le numéro 21 sur sa nouvelle fiche d'identité, soit autant que le nombre de spécimens recensés depuis le début de l'inventaire de la biodiversité entamé l'an passé, la petite tortue est ensuite relâchée dans l'eau marécageuse.

Sa capture intervient dans le cadre d'un vaste programme de suivi écologique mandaté par le département, propriétaire de cette réserve biologique nouvellement créée, classée espace naturel sensible.

Prévu jusqu'en 2027, il vise à documenter la dynamique des espèces, dont 17 remarquables et protégées, après la perte de leur écosystème parti en fumée.

Le naturaliste François Léger lime les bords de la carapace d'une tortue cistude, récupérée dans un étang de la réserve biologique d'Hostens, de façon à pouvoir l'identifier, le 18 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

Le naturaliste François Léger lime les bords de la carapace d'une tortue cistude, récupérée dans un étang de la réserve biologique d'Hostens, de façon à pouvoir l'identifier, le 18 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

Les cistudes recensées, âgées de 7 à 15 ans - au vu du nombre de stries visibles sur le plastron - "ont probablement pu se réfugier en cœur de lagune, lorsque cela brûlait tout autour, ou se mettre dans la vase pour survivre", suppose François Léger, naturaliste de l'association Cistude Nature, l'un des acteurs chargés de l'inventaire d'une partie de la faune.

Cette espèce endémique du Sud-Ouest "a retrouvé des habitats qui lui étaient favorables et trouvé de la ressource alimentaire. C'est plutôt un bon signal", pointe ce spécialiste, qui s'inquiète de l'absence d'autres animaux. Certains, peu mobiles, n'ont pu réchapper aux flammes.

- Recolonisation -

Ainsi, les reptiles, déjà en déclin au niveau national, ont quasiment disparu. "Le lézard vivipare s'est effondré de 80% avec un seul individu repéré sur plusieurs sites l'an passé et aucun cette année", pointe François Léger.

De la végétation pousse dans une zone dévastée par les incendies de 2022 à Hostens, le 11 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

De la végétation pousse dans une zone dévastée par les incendies de 2022 à Hostens, le 11 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

A l'inverse, la repousse de la végétation a favorisé une remise en place de la chaîne alimentaire chez les insectes: la présence de phytophages (se nourrissant de plants) tels que les pucerons attire sa cohorte de prédateurs (araignées) et de parasitoïdes (qui ont besoin d'un autre pour se développer, comme des guêpes).

Insectes emblématiques des Landes de Gascogne, le Fadet des laîches (papillon) ou la Leucorrhine à front blanc (libellule) sont aussi réapparus tout comme des espèces d'oiseaux tels que l'engoulevent d'Europe, la fauvette pitchou, l'alouette lulu.

Vue aérienne de la végétation poussant au bord d'un étang de la réserve biologique d'Hostens dans une zone dévastée par les incendies de 2022 à Hostens, le 11 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

Vue aérienne de la végétation poussant au bord d'un étang de la réserve biologique d'Hostens dans une zone dévastée par les incendies de 2022 à Hostens, le 11 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

Le courlis cendré, reconnaissable à son long bec courbé a aussi réinstallé ses nids dans des zones devenues clairsemées, après être resté invisible pendant des décennies.

Car ici, les fougères et de jeunes plants de saule, trembles et bouleaux - espèces pionnières avant l'installation d'une nouvelle végétation - ont remplacé les pins maritimes.

- Sous cloche -

"On a retrouvé des espèces patrimoniales comme la drosera (plante carnivore) ou la spiranthe d'été (orchidée) surtout dans les zones humides qui ont mieux résisté", note Margaux Moreto, du Conservatoire botanique national Sud-Atlantique.

La botaniste Margaux Moreto du Conservatoire botanique national Sud-Atlantique effectue un recensement de la flore dans une zone dévastée par les incendies de 2022 à Hostens, le 11 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

La botaniste Margaux Moreto du Conservatoire botanique national Sud-Atlantique effectue un recensement de la flore dans une zone dévastée par les incendies de 2022 à Hostens, le 11 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

"Maintenant on va s'attacher à suivre la dynamique d'autres plantes, comme la molinie ou le phragmite, qui ont tendance à être un peu dynamisées par le feu", au risque de coloniser l'espace, considère la botaniste.

Après l'incendie, la collectivité a décidé de transformer une partie des 750 hectares du domaine départemental, touché à 80% par le feu, en réserve biologique dirigée sur 433 hectares, et en réserve biologique intégrale de 48 hectares consacrée à la libre évolution de la forêt, sans intervention de l'homme.

De la bruyère pousse sous un arbre mort dans une zone dévastée par les incendies de 2022 à Hostens, le 11 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

De la bruyère pousse sous un arbre mort dans une zone dévastée par les incendies de 2022 à Hostens, le 11 juin 2025 en Gironde ( AFP / Christophe ARCHAMBAULT )

"Nous retrouvons une lande qui sera beaucoup plus humide, probablement à terme et qui va retrouver à peu près les caractéristiques de ce que nous avions connu avant l'implantation massive de pins fin XIXe siècle sous l'impulsion de Napoléon III", pointe le président du département Jean-Luc Gleyze.

"Cela va être intéressant de voir sur le temps long comment le couvert forestier va reprendre tout doucement sa place, comment ces espèces se maintiennent ou, au contraire, laissent leur place à d'autres", souligne l'élu socialiste.

A condition qu'une autre inconnue ne vienne pas perturber ce début de résilience: le réchauffement climatique.

0 commentaire

Signaler le commentaire

Fermer

A lire aussi