Qu'est-ce que l'ISR ?

L'investissement socialement responsable consiste à appliquer les principes du développement durable aux investissements en sélectionnant les entreprises sur la base de critères financiers, ainsi que de critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance (ESG). Explications.
On accuse souvent le monde de l'investissement d'être sans principes. C'est pourtant loin d'être le cas. Depuis plusieurs années, l'investissement socialement responsable, ou «ISR», prend une importance croissante dans l'univers de la finance. Le but : faire en sorte que l'investissement soit une manière de soutenir les entreprises les plus vertueuses au quotidien, en délaissant a contrario les entreprises jugées insuffisamment sensibles à ces sujets.
Les particuliers peuvent bien sûr eux-mêmes choisir d'investir dans des entreprises dont ils soutiennent les activités ou les principes de fonctionnement vis-à-vis du développement durable. Néanmoins, il est souvent difficile d'avoir soi-même une expertise dans ce domaine, tout en ayant une bonne gestion du risque financier. C'est pour cela qu'ont été créés des fonds dits «ISR», gérés par des professionnels spécialisés sur ces thématiques. Les gérants de ces fonds mettent les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) au premier plan de leurs choix d'investissements.
Cependant, depuis deux à trois ans, l'ISR fait face à des vents contraires. La hausse de l'inflation et les tensions géopolitiques, notamment liées à des conflits internationaux, ont favorisé les secteurs de l'énergie fossile et de la défense. Ces secteurs, souvent exclus des portefeuilles ISR, ont enregistré des performances remarquables, attirant ainsi des investisseurs en quête de rendements rapides. Par exemple, les valeurs de la défense ont connu une envolée spectaculaire, soutenues par l'augmentation des budgets militaires dans de nombreux pays.
En parallèle, le concept d'ISR est également remis en question aux États-Unis, où certains grands acteurs de la gestion ont choisi de se désengager de certaines initiatives de durabilité. Des sociétés de gestion influentes ont récemment quitté des alliances telles que la Net Zero Asset Managers Initiative, invoquant des pressions politiques et des critiques croissantes à l'égard des stratégies ESG. Ce désengagement reflète un climat de scepticisme croissant envers les initiatives de durabilité, alimenté par des débats politiques polarisés et des changements dans les priorités économiques.
Malgré ces défis, l'ISR continue de se structurer et de se renforcer. Le label ISR, réformé récemment, impose désormais des critères encore plus stricts pour garantir que les fonds labellisés excluent les entreprises exploitant des hydrocarbures ou du charbon, et qu'ils soutiennent activement la transition énergétique. Ces nouvelles exigences visent à aligner les pratiques financières avec les objectifs de l'Accord de Paris sur le climat.
Le succès de l'ISR se reflète dans les chiffres : en France, les fonds ISR représentent désormais une part significative du marché, avec des milliards d'euros investis dans des entreprises engagées dans des pratiques durables et responsables. Cette tendance montre que les investisseurs, qu'ils soient particuliers ou institutionnels, cherchent de plus en plus à donner du sens à leur épargne tout en obtenant des rendements compétitifs.
Quelles sont les différentes formes de l'ISR ?
Plusieurs méthodes peuvent être appliquées par les fonds ISR pour sélectionner les valeurs qui pourront entrer en portefeuille. On distingue notamment trois formes de gestion ISR.
Les fonds d'« exclusion »
fonctionnent sur le principe de l'exclusion de certaines valeurs ou secteurs entiers en inadéquation avec les principes du développement durable. Ici, les gérants de fonds ISR refusent d'investir dans des entreprises aux activités considérées comme néfastes sur le plan écologique, social et parfois moral, dans le monde anglo-saxon. Le non-respect de certaines normes internationales peut également être un critère d'exclusion. À titre d'exemple, peuvent être exclues les entreprises du secteur des énergies fossiles, de l'armement ou du tabac.
Les fonds « sélection ESG »
réalisent leurs choix d'investissements sur des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance de l'entreprise (critères « ESG »), tout en y ajoutant des critères financiers « classiques ». L'approche se concentre moins sur l'activité des entreprises en elle-même, que sur la manière dont ces entreprises réalisent leur activité. À titre d'exemple, une entreprise de vente de détail pourra être sélectionnée si elle réalise des efforts significatifs en termes de respect de l'environnement et de bon traitement du personnel, alors qu'une entreprise semblable aux efforts plus laxistes ne sera pas retenue.
L'engagement actionnarial
est quant à lui un principe différent des deux précédents. L'objectif est ici d'investir dans le but d'influencer le comportement des entreprises au travers de l'exercice des droits de vote. La participation aux assemblées générales peut permettre le dépôt de résolutions sur des sujets environnementaux ou sociaux de manière à pousser l'entreprise à modifier leurs pratiques en la matière. Cette pratique, très répandue chez les anglo-saxons, se déploie désormais en France.
L'ISR est aussi synonyme de rentabilité
L'image de l'ISR pâtit parfois du sentiment que le retour sur investissement qui en résultera sera plus faible que celui obtenu avec une gestion de portefeuille moins « restrictive ». Ce sentiment est néanmoins une idée reçue. L'ISR ne cherche pas à sacrifier le rendement au profit de vertus écologiques ou sociales, mais à aligner les intérêts financiers avec ceux du développement durable. Les entreprises sélectionnées par un fonds ISR peuvent ainsi être tout aussi rentables que leurs consoeurs n'entrant pas dans ces mêmes critères. Plusieurs études académiques montrent que l'ISR ne réduit pas la performance financière (méta-études cabinet Mercer et Deutsche Bank).
L'intérêt des fonds gérés par des professionnels est même précisément de parvenir à allier ces différents challenges de l'ISR, parfois difficiles à concilier pour un investisseur particulier. Ce dernier aura tendance à investir des sommes importantes sur des valeurs « coups de coeur », oubliant au passage la diversification sectorielle et la recherche d'une rentabilité correspondant au niveau de risque pris.
Les grands acteurs de l'ISR
La France est un pays très dynamique en matière d'ISR. Les institutions de retraite publique, les syndicats (au travers du Comité Intersyndical de l'Épargne Salariale, «CIES») et les gestionnaires d'actifs continuent d'être des moteurs essentiels de son développement. Ces acteurs jouent un rôle clé dans l'intégration des critères «ESG» au cœur de la stratégie d'investissement.
En parallèle, des organisations en assurent la promotion. Les plus emblématiques sont notamment le Forum pour l'investissement responsable («FIR»), association qui réunit l'ensemble des acteurs de l'ISR français, ainsi que Novethic, filiale de la Caisse des Dépôts. Novethic reste un média incontournable sur les thématiques du développement durable et un centre d'études sur l'ISR. Depuis ses premières initiatives en 2009 avec les labels ISR, Novethic continue de contribuer à la structuration et à la crédibilité de l'ISR en France. Ces labels, repris et enrichis par le Ministère des Finances, sont désormais largement adoptés par le marché.
À l'échelle européenne, l'ISR bénéficie du soutien d'organisations telles qu'Eurosif (European Sustainable Investment Forum), dont le FIR est membre fondateur. Eurosif joue un rôle stratégique dans la coordination des initiatives de durabilité à travers l'Union européenne, en favorisant la transparence et les bonnes pratiques dans les investissements responsables.
Au niveau mondial, les investisseurs responsables participent activement aux «Principles for Responsible Investment» («PRI»). Ces principes, adoptés par des milliers d'acteurs financiers, cherchent à intégrer les enjeux ESG dans leurs processus d'investissement pour construire un futur plus durable et éthique. Les PRI gagnent en influence, malgré certains défis politiques et économiques dans certaines régions, notamment aux États-Unis.
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